Article mis à jour le 01/07/2024.
Les partenaires sociaux, après plusieurs réunions de négociations, ont abouti à la conclusion d’un ANI (accord national interprofessionnel) le 10 février 2023, sur le partage de la valeur. Le législateur l’a transposé dans la loi du 29 novembre 2023, entrée en application le 1er décembre 2023.
En plus de différents mécanismes visant à inciter les entreprises à partager la valeur de l’entreprise avec leurs salariés, deux régimes obligatoires ont été créés : un dispositif expérimental pour les entreprises de 11 à 49 salariés et une obligation pérenne dans les entreprises comptabilisant au moins 50 salariés.
Entreprises de 11 à 49 salariés : une nouvelle obligation de partage de la valeur
Les entreprises dont l’effectif est compris entre 11 et moins de 50 salariés sont concernées par une nouvelle obligation de partage de la valeur à compter du 1er janvier 2025.
Quelles sont les entreprises concernées par la nouvelle obligation de partage de la valeur ?
Sont concernées par cette nouvelle obligation les entreprises d’au moins 11 salariés n’étant pas soumises à l’obligation de mettre en place un régime de participation. Il s’agit donc en pratique des entreprises dont l’effectif est compris entre 11 et moins de 50 salariés.
Sont visées les entreprises constituées sous forme de sociétés. Les entreprises individuelles ne sont donc pas soumises à l’obligation. Il existe également une exception pour les sociétés anonymes à participation ouvrière (Sapo) qui versent un dividende à leurs salariés au titre de l’exercice écoulé, et dont le taux d’intérêts sur la somme versée aux porteurs d’actions de capital est égal à 0%.
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Partage de la valeur des associations, fondations, mutuelles, coopératives : Qu’en est-il des structures de l’économie sociale et solidaire ?
Il est ici question des associations, des fondations, des mutuelles, des coopératives. Par nature, elles ne génèrent pas de bénéfice net fiscal. Elles ne sont notamment pas soumises à la participation.
La loi de partage de la valeur du 29 novembre 2023 institue un dispositif spécifique pour ces structures qui n’ont pas de bénéfice net fiscal mais qui constatent un résultat excédentaire au moins égal à 1% de leurs recettes pendant 3 exercices consécutifs. Si un accord de branche l’autorise, les entreprises remplissant ces conditions devront, dès le 1er janvier 2025, mettre en place un dispositif d’intéressement, abonder un plan d’épargne salariale ou un PEREC, ou verser une prime de partage de la valeur à leurs salariés.
À lire : Tout savoir sur la prime de partage de la valeur 2023.
Quelles conditions pour être soumis à l’obligation au regard de la loi ?
Les entreprises constituées sous forme de société et n’étant pas soumises à l’obligation de mettre en place la participation doivent vérifier leur bénéfice net fiscal. Si celui-ci représente au moins 1% de leur chiffre d’affaires pendant 3 exercices consécutifs, elles sont visées par l’obligation de partage de la valeur.
Comment se matérialise l’obligation de partage de la valeur ?
Les entreprises remplissant l’ensemble des conditions fixées par la loi du 29 novembre 2023 doivent se doter, au cours de l’exercice suivant le dernier des 3 exercices analysés, d’au moins un des dispositifs légaux de partage de la valeur.
Elles en sont exonérées seulement si elles sont déjà couvertes par l’un de ces dispositifs au moment de la réalisation de la condition relative au bénéfice net fiscal.
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Quels sont les dispositifs légaux de partage de la valeur que les entreprises peuvent mettre en place ?
Afin de satisfaire leur obligation de mettre en place un dispositif légal de partage de la valeur, les entreprises ont le choix entre :
- La mise en place d’un dispositif de participation (par adhésion à un accord de branche agréé, par application d’un régime de participation volontaire ou par application du régime de participation moins favorable prévu par la même loi sur le partage de la valeur.
- La mise en place d’un accord d’intéressement (par adhésion à un accord de branche agréé, par accord ou décision unilatérale).
- L’abondement d’un plan d’épargne salariale (PEE, PEI, Perco, Perco-I, Pereco d’entreprise ou interentreprise, PEREC, PEREC interentreprise).
- Le versement d’une prime de partage de la valeur.
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Obligation de partage de la valeur : À compter de quand cette obligation pèse-t-elle sur les entreprises ?
Cette obligation de partage de la valeur ajoutée entre en application le 1er janvier 2025. Cela signifie que les entreprises devront vérifier la condition tenant au bénéfice net fiscal sur les 3 exercices antérieurs (2024, 2023, 2022). Si la condition est remplie, l’entreprise devra se doter en 2025 d’au moins l’un des dispositifs légaux de partage de la valeur existants.
Exemple : dans une entreprise comptabilisant 20 salariés et dont l’exercice comptable est calqué sur l’année civile, le bénéfice net fiscal est au moins égal à 1% sur chiffres d’affaires sur les exercices 2024, 2023, 2022. Au cours de l’exercice de l’année 2025, l’entreprise a l’obligation de mettre en place un dispositif légal de partage de la valeur.
Cette obligation pensant sur les entreprises d’au moins 11 salariés est un dispositif expérimental d’une durée de 5 ans. Les partenaires sociaux se verront transmettre chaque année un suivi. Puis, avant la date d’expiration du dispositif, le Gouvernement dressera un bilan des 5 années de l’expérimentation.
Entreprises d’au moins 50 salariés : une nouvelle obligation de négocier sur le partage de la valeur
La loi du 29 novembre 2023 met à la charge des entreprises d’au moins 50 salariés une nouvelle obligation de négocier sur le thème du partage de la valeur. Un questions-réponses a également été publié par le ministère du travail, de la santé et des solidarités, afin d’éclairer le texte de loi.
Quelles sont les entreprises concernées ?
Selon l’article 9 de l’ANI, transposé fidèlement dans la loi, l’obligation tenant au partage de la valeur s’applique aux entreprises ou aux unités économiques et sociales (UES) dotées d’au moins un délégué syndical et soumises à l’obligation d’instituer un régime de participation. Les entreprises ne dégageant pas un bénéfice net fiscal suffisant pour calculer une réserve spéciale de participation (RSP) sont quand même concernées par l’obligation visée par la loi.
Il s’agit de l’unique condition à vérifier pour déterminer l’éligibilité de l’entreprise à l’obligation mise en place par la loi de partage de la valeur.
Ne sont pas concernées par l’obligation visée par la loi sur le partage de la valeur :
- Les entreprises dotées d’un accord de participation ou d’intéressement comportant déjà une clause particulière tenant compte de l’augmentation exceptionnelle du bénéfice fiscal et des modalités de partage de la valeur en découlant
- Les entreprises pourvues d’un accord de participation avec une base de calcul aboutissant à un résultat plus favorable pour les salariés que la formule de calcul légale de la réserve spéciale de participation.
- Les entreprises justifiant d’un accord spécifique sur la définition d’une augmentation exceptionnelle de leur bénéfice et sur les modalités de partage de la valeur en découlant (à condition que la négociation ait été engagée avant le 30 juin 2024).
- Les entreprises bénéficiant, à la date d’entrée en vigueur de la loi, du report de 3 ans de la mise en place de la participation en cas de couverture par un accord d’intéressement.
- Les entreprises nouvellement créées qui bénéficient d’un report de deux exercices.
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Comment se matérialise l’obligation de partage de la valeur ?
L’article L. 3346-1 du Code du travail, découlant de la loi partage de la valeur, prévoit que les entreprises remplissant les conditions précédemment définies doivent négocier sur les conséquences d’une augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal en matière de partage de la valeur.
À titre de précision, le bénéfice net fiscal est le bénéfice réalisé en France métropolitaine et dans les départements d’outre-mer, constituant l’assiette d’impôt sur les sociétés ou sur le revenu. Le bénéfice net fiscal représente la base de calcul de la réserve spéciale de participation (lorsque la formule de droit commun est retenue par les partenaires à la négociation de l’accord de participation).
Négociation sur la définition de l’augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal
Les entreprises doivent dans un premier temps intégrer à leurs négociations portant sur la participation ou l’intéressement, ce qui doit être entendu par « augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal » dans l’entreprise.
Le questions-réponses prévoit que les dispositifs d’intéressement et de participation pouvant être conclus indifféremment avec les délégués syndicaux, un ou plusieurs salariés mandatés, le comité social et économique ou à la majorité des 2/3 des salariés, l’entreprise peut remplir son obligation de négociation avec les partenaires de son choix.
La négociation sur les bénéfices exceptionnels peut être mise en œuvre à un autre niveau que l’entreprise (UES, groupe, infra-groupe).
L’article L. 3346-1 du Code du travail précise que doivent notamment être pris en compte les critères tels que la taille de l’entreprise, le secteur d’activité, la survenance d’une ou plusieurs opérations de rachat d’actions de l’entreprise suivie de leur annulation dès lors qu’elles n’ont pas été précédées des attributions aux salariés dans les conditions prévues par le Code du commerce, ainsi que les bénéfices réalisés lors des années précédentes ou les événements exceptionnels externes à l’entreprise intervenus avant la réalisation du bénéfice.
Cette liste de critères est non exhaustive, comme le précise le questions-réponses du ministère du travail. Elle peut ainsi être complétée dans le cadre de la négociation.
Négociation sur les modalités de partage de la valeur avec les salariés
Les partenaires sociaux doivent ensuite déterminer quelles modalités de partage de la valeur seront mises en œuvre lorsque l’augmentation exceptionnelle du bénéfice sera caractérisée.
Les partenaires sociaux disposent de plusieurs options :
Le versement direct d’une somme aux salariés découlant d’un dispositif déjà en place dans l’entreprise
Les partenaires à la négociation peuvent prévoir que si le bénéfice net fiscal a augmenté dans les conditions précédemment négociées, un supplément de participation ou un supplément d’intéressement (si l’entreprise dispose d’un accord d’intéressement) sera versé.
L’ouverture d’une négociation sur la mise en œuvre d’un nouveau dispositif de partage de la valeur dans l’entreprise
Les partenaires sociaux peuvent déterminer que l’augmentation exceptionnelle du bénéfice déclenchera l’ouverture d’une nouvelle négociation entre les partenaires sociaux pour mettre en place :
- Le versement d’un supplément de participation.
- Le versement d’un supplément d’intéressement (si l’entreprise est dotée d’un accord d’intéressement).
- La mise en place d’un accord d’intéressement.
- L’abondement patronal à un plan d’épargne salariale (PEE, PEI, Perco, Perco-I, PEREC, PERE regroupé).
- L’institution d’une prime de partage de la valeur.
Etant à préciser que dans ce cas, l’obligation porte seulement sur l’ouverture de la négociation. Si les négociations entre les partenaires sociaux n’aboutissent pas à la mise en place d’un dispositif de partage de la valeur, l’employeur aura quand même rempli l’obligation découlant de la loi du 29 novembre 2023.
Le questions-réponses du ministère du travail précise qu’il n’est pas possible de négocier séparément, avant le 30 juin 2024, d’une part un accord sur la participation ou l’intéressement et d’autre part, un accord sur le partage de la valeur en cas d’augmentation exceptionnelle des bénéfices. Il s’agit bien d’une seule et même négociation. Il n’est cependant pas exclu que cette négociation aboutisse à la conclusion de plusieurs accords.
À savoir : Refus d’un CDI après un CDD, l’employeur a l’obligation d’informer France Travail depuis le 1er janvier 2024.
Quel timing pour l’ouverture des négociations partage de la valeur ?
Si l’entreprise n’est pas dotée d’un accord de participation ou d’intéressement, la négociation sur le partage de la valeur doit se tenir au moment de la négociation sur la mise en place de la participation obligatoire, et le cas échéant, de l’intéressement.
Si l’entreprise est couverte par un accord d’intéressement ou de participation au 29 novembre 2023, la négociation doit être engagée au plus tard le 30 juin 2024. Une négociation spécifique sur l’obligation visée par la loi doit être engagée si l’accord d’intéressement ou l’accord de participation concerné ne répond aux dispositions légales.
À noter : tant pour les entreprises de moins de 50 salariés que pour les entreprises d’au moins 50 salariés, la loi de partage de la valeur ne prévoit pas de sanction aux employeurs qui ne se soumettraient pas à ces nouvelles obligations de partage de la valeur.
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