La loi PACTE renforce l’attractivité du dispositif d’intéressement. Ainsi, sa formule de calcul peut être complétée d’objectifs pluriannuels, l’intéressement de projet est ouvert aux projets internes, le plafond individuel de versement est relevé et la distribution du reliquat est autorisée. La loi simplifie aussi certaines procédures et comble certaines lacunes.
Contrôle de légalité de l’accord d’intéressement : vers une sécurisation complète des exonérations sociales et fiscales ?
Un accord d’intéressement ne peut produire effet et donner lieu à exonération que s’il est déposé auprès de l’administration (C. trav., art. L. 3313-1).
Remarque : l’accord doit être déposé dans les 15 jours suivant sa conclusion (C. trav., art. D. 3313-1). Aujourd’hui, ce dépôt doit être fait sur la plateforme TéléAccords du ministère du travail.
À compter de ce dépôt s’ouvre un délai de 4 mois au cours duquel la Direccte examine la validité de l’accord (C. trav., art. L. 3345-2).
Remarque : l’administration s’assure uniquement de la recevabilité formelle de l’accord. Elle vérifie que les clauses, telles que rédigées dans l’accord, sont conformes à la loi et à la réglementation en vigueur (contrôle de légalité) mais ne vérifie pas si l’application d’une clause, au demeurant correctement rédigée, contrevient en pratique à la loi et aux règlements. Si d’aventure c’est le cas, l’employeur ne peut pas se réfugier derrière la validation administrative pour éviter un redressement Urssaf.
Le législateur a souhaité sécuriser davantage les conséquences de ce contrôle de légalité sur les exonérations sociales et fiscales, en s’inspirant du modèle du rescrit social (C. trav., art. L. 3313-1 modifié par Loi PACTE, art. 155, I, 5°). Les modifications apportées au contrôle sont résumées dans le tableau ci-après.
Contrôle de légalité (avant/après) : tableau de synthèse
Étapes de la procédure | Accord déposé avant la publication de la loi | Accord déposé après la publication de la loi |
Délai de contrôle | 4 mois à compter du dépôt de l’accord | 4 mois à compter du dépôt de l’accord |
Conséquences du silence de la Direccte à l’expiration du délai de contrôle | Pas de remise en cause des exonérations sociales et fiscales au titre des exonérations en cours ou antérieures à toute contestation ultérieure | Exonérations fiscales (pour l’entreprise et le salarié) réputées acquises pour la durée de l’accord |
Nouveau délai de contrôle ? | Non | Oui : 2 mois supplémentaires (1) |
Conséquences du silence de la Direccte à l’expiration de ce nouveau délai | Exonérations sociales et fiscales réputées acquises pour la durée de l’accord, y compris en cas de non-respect de la règle de non substitution à un élément de salaire (2) |
1. Jusqu’à la fin du 6ème mois suivant le dépôt, la Direccte peut demander la modification des dispositions contraires à la loi pour une mise en conformité pour les exercices suivant ce dépôt. Concrètement, cela signifie que les exonérations fiscales du 1er exercice sont définitivement acquises passé le délai de 4 mois mais que celles des 2e et 3e exercices ne le seront que passé le délai des 2 mois supplémentaires.
2. Supprimer un élément de salaire et le remplacer par de l’intéressement est interdit. Cette interdiction est limitée dans le temps : 12 mois entre le dernier versement de l’élément de salaire supprimé et la date d’effet de l’accord d’intéressement.
Calcul et distribution de l’intéressement
Une formule de calcul pouvant être complétée d’objectifs pluriannuels
Pour bénéficier des régimes social et fiscal de faveur, l’intéressement doit notamment résulter d’une formule de calcul liée :
- Soit aux résultats financiers de l’entreprise.
- Soit à ses performances.
- Soit aux deux.
Une période de calcul doit aussi être fixée dans l’accord. Elle est en principe annuelle mais peut être infra-annuelle à condition de ne pas être inférieure à 3 mois.
La loi PACTE a quelque peu assoupli cette formule de calcul (C. trav., art. L. 3314-2 mod. par Loi PACTE, art. 156).
L’accord d’intéressement devra toujours comporter une formule de calcul annuelle ou infra-annuelle (3, 4 ou 6 mois) liée aux résultats et/ou aux performances de l’entreprise (obligatoire) mais il pourra aussi comporter une formule pluriannuelle liée aux résultats de l’entreprise ou à ses performances (dispositif facultatif).
Important à lire : Les mesures de la loi PACTE.
Plafond de versement de l’intéressement aligné sur celui de la participation
Deux plafonds viennent limiter les sommes à distribuer aux bénéficiaires de l’intéressement :
- Un plafond au montant de l’enveloppe globale fixé à 20 % des rémunérations brutes versées aux salariés au cours de l’exercice de l’intéressement ;
- Un plafond au montant de la prime individuelle, fixé jusqu’à présent à la moitié du plafond annuel de la Sécurité sociale.
La loi PACTE relève le montant du deuxième plafond (plafond individuel) et l’aligne sur celui applicable en matière de participation. Désormais, le montant de la prime d’intéressement distribué à chaque bénéficiaire ne peut, au titre d’un même exercice, excéder une somme égale aux ¾ du plafond annuel de la Sécurité sociale (PASS), étant entendu que le PASS à retenir est celui en vigueur lors de l’exercice au titre duquel l’intéressement se rapporte (C. trav., art. L. 3314-8 mod. par Loi PACTE, art. 155, I. 8°).
À noter que les plafonds d’exonération fiscale sont également relevés aux ¾ du plafond annuel de la Sécurité sociale, ceci afin que le placement de l’intéressement sur les plans d’épargne salariale reste avantageux (C. trav., art. L. 3315-2 et L. 3315-3 mod. par Loi PACTE, art. 155, I. 9°).
Distribution possible du reliquat de l’intéressement
Le code du travail prévoit de longue date un mécanisme de répartition du reliquat pour la participation. Concrètement, les sommes issues de la participation qui n’ont pu être distribuées en raison du plafond individuel (3/4 du plafond annuel de la Sécurité sociale) font l’objet d’une nouvelle répartition entre tous les salariés n’ayant pas atteint ledit plafond selon les mêmes modalités de répartition. Si des sommes subsistent encore après cette nouvelle répartition, il est procédé à une nouvelle répartition dans les mêmes conditions. Si un reliquat subsiste encore alors que tous les salariés ont atteint le plafond, il demeure dans la réserve spéciale de participation et sera réparti au cours des exercices ultérieurs (C. trav., art. L. 3324-7).
Ce mécanisme de distribution du reliquat n’existait pas pour l’intéressement. Les sommes distribuées à un salarié au-delà du plafond annuel individuel devaient donc être intégrées dans l’assiette des cotisations sociales et dans le revenu net imposable du salarié.
La loi PACTE comble cette lacune, en tout cas partiellement (C. trav., art. L. 3314-11 créé par Loi PACTE, art. 157). La distribution du reliquat de l’intéressement est autorisé à deux conditions :
- L’accord d’intéressement doit le prévoir expressément.
- La répartition du reliquat doit être faite selon les mêmes modalités que la répartition originelle.
En revanche, contrairement à la participation, la redistribution sur les exercices ultérieurs du reliquat subsistant encore après atteinte du plafond individuel par tous les salariés, n’est pas autorisée. Dans une telle hypothèse, il faudra donc répartir le reliquat entre les salariés (en respectant les critères de répartition originelle) et l’intégrer dans l’assiette des cotisations sociales et dans le revenu net imposable de chaque salarié.
Répartition proportionnelle aux salaires : du nouveau pour les conjoints collaborateurs ou associés des travailleurs indépendants
Pour répartir l’enveloppe de l’intéressement, l’entreprise peut choisir l’un ou l’autre des critères de répartition énumérés par la loi, à savoir :
- La répartition égalitaire ou uniforme.
- La répartition proportionnelle à la durée de présence.
- La répartition proportionnelle au salaire.
Elle peut aussi les combiner.
Si le dirigeant et son conjoint collaborateur ou associé bénéficient de l’intéressement, la répartition proportionnelle au salaire prend en compte la rémunération annuelle ou le revenu professionnel imposé à l’impôt sur le revenu au titre de l’année précédente, dans la limite d’un plafond égal au salaire le plus élevé versé dans l’entreprise. La loi PACTE introduit une faculté pour les conjoints collaborateurs ou associés liés au dirigeant par mariage ou par Pacs. Pour ces bénéficiaires, l’accord peut prévoir expressément que la répartition proportionnelle au salaire peut retenir un montant ne pouvant excéder ¼ du plafond annuel de la Sécurité sociale (C. trav., art. L. 3314-6 mod. par Loi PACTE, art. 155, I. 7°).
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Source de l’article sur la loi PACTE et l’intéressement : Editions législatives 2019.