La preuve du harcèlement moral au travail

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La preuve du harcèlement moral au travail est très importante. À la condition d’examiner tous les éléments invoqués par le salarié, puis de prendre en compte dans leur ensemble ceux matériellement établis, le juge apprécie souverainement s’ils permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral.

 

La preuve du harcèlement moral au travail : Ce que dit la Cour de cassation

La Cour de cassation rappelle, dans un arrêt promis à une large publication, l’aménagement de la charge de la preuve applicable en matière de harcèlement (C. trav. art. L 1154-1) et l’office des juges du fond dans la qualification de harcèlement moral.

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Cet arrêt sur la preuve du harcèlement moral au travail, à visée pédagogique à l’égard des juges du travail, consacre un recul sous conditions du contrôle de la Cour de cassation en la matière.

Petit rappel de la définition de harcèlement moral au travail : « Le harcèlement moral est une conduite abusive qui par des gestes, paroles, comportements, attitudes répétées ou systématiques vise à dégrader les conditions de vie et/ou conditions de travail d’une personne (la victime du harceleur) », source Wikipédia.

 

Harcèlement moral : Un mode d’emploi des règles de preuve et de l’office du juge

La Cour de cassation indique que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral au travail, il appartient au juge :

  • D’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, sans écarter les documents médicaux éventuellement produits.
  • D’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer et d’apporter la preuve du harcèlement moral au sens de l’article L 1152-1 du Code du travail. Si c’est le cas, il doit apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Sous réserve d’exercer son office dans les conditions qui précèdent, et qui sont contrôlées par la Cour de cassation, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et si l’employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.

 

Harcèlement moral preuve : Un allègement du contrôle de la Cour de cassation sur la qualification du harcèlement ?

C’est la première fois, depuis les arrêts de 2008 par lesquels elle avait décidé de contrôler la qualification du harcèlement moral (Cass. soc. 24-9-2008 n° 06-45.579, 06-45.747, 06-43.504 : RJS 11/08 n° 1070), que la Cour de cassation reconnaît au juge du fond dans un attendu de principe un tel pouvoir souverain d’appréciation en matière de harcèlement. Jusqu’ici, il n’était officiellement admis que pour l’appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve produits par le salarié (notamment Cass. soc. 11-2-2015 n° 13-26.198 ; Cass. soc. 13-1-2016 n° 14-10.599).

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Il est vrai que, dans la plupart des décisions récentes, la Cour de cassation ne contrôlait déjà que la méthode suivie par les juges du fond, censurant des décisions qui :

  • N’avaient pas examiné un élément invoqué (Cass. soc. 25-5-2016 n° 15-12.304).
  • Avaient examiné les éléments séparément au lieu de les apprécier dans leur ensemble (Cass. soc. 11-2-2015 n° 13-23.001 ; Cass. soc. 2-6- 2016 n° 15-11.414).
  • N’avaient pas pris en compte un élément établi de nature à faire présumer un harcèlement moral et donc la preuve du harcèlement moral au travail (Cass. soc. 2-6-2016 n° 15-12.361).

Il arrivait toutefois, y compris dans des décisions très récentes, que la Haute Juridiction exerce encore un contrôle renforcé, au moins sur l’erreur manifeste de qualification.

Par exemple en censurant une décision au motif qu’il résultait des constatations de la cour d’appel que les éléments établis permettaient de présumer l’existence d’un harcèlement (Cass. soc 2-7-2014 n° 13-10.979 : RJS 11/14 n° 766) ; ou encore en décidant que la cour d’appel a pu déduire de ses constatations l’existence d’un harcèlement moral (Cass. soc. 2-3-2016 n° 14-23.684), ou en contrôlant la pertinence des justifications apportées par l’employeur (Cass. soc. 20-1-2016 n° 14-20.541).

La décision du 8 juin marque-t-elle donc un allègement de ce contrôle, y compris pour des décisions de juges du fond ne respectant pas les contours de la définition du harcèlement moral dégagés par la Cour de cassation au cours de ces dernières années ?

Nous attendrons avec intérêt de prochaines décisions répondant à cette question et permettant d’approfondir la preuve du harcèlement moral au travail.

À noter : Un article du projet de loi Travail adopté en première lecture à l’Assemblée nationale prévoit d’aligner les règles de preuve du harcèlement sur celles applicables en matière de discrimination. Ainsi, il s’agirait pour le salarié de simplement présenter des éléments laissant supposer l’existence d’un harcèlement moral, et non plus d’établir des faits permettant de le présumer.

Suite à cet article sur la preuve du harcèlement moral au travail, nous vous invitons à lire : Le harcèlement moral au travail.

Source de l’article sur le harcèlement moral preuve : Cass. soc. 8-6-2016 n° 14-13.418.

 

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